Publié le 17 janvier 2022
Un précédent travail visait à analyser l’évolution de l’avifaune* bourguignonne depuis un siècle, notamment à partir de documents anciens. Cette fois, nous avons étudié la période 2006-2018 en nous basant sur les données des associations ornithologiques publiées dans les atlas des oiseaux nicheurs de la région et de France. Nous avons aussi comparé ces données avec celles de nos voisins européens et il apparaît que nos conclusions vont dans le même sens. La décennie représente un laps de temps pertinent pour dégager des tendances en écologie. S’il est compliqué d’évaluer précisément les effectifs d’une espèce, des tendances fiables peuvent par contre être établies pour savoir si les effectifs sont en déclin, en hausse ou stables.
Entre 2006 et 2018, 179 espèces nicheuses, c’est-à-dire s’étant reproduites de façon certaine, ont été dénombrées en Bourgogne. Ce nombre a un peu augmenté par rapport à la décennie précédente. Selon les habitats (milieux forestiers, milieux humides, milieux ouverts et milieux bâtis ou rocheux), on constate une très forte disparité. Les espèces des bâtis progressent légèrement, celles des milieux humides fortement. En forêt, les oiseaux montrent une grande stabilité.
Ce constat diffère partiellement de celui du programme STOC (Suivi temporel des oiseaux communs, réalisé principalement par les LPO et coordonné par le Museum National d’Histoire Naturelle), car ce dernier range dans une autre catégorie, celle des « ubiquistes », des oiseaux comme le Geai des chênes, la Mésange bleue et le Pigeon ramier qui, à partir de la forêt, étendent depuis peu leur habitat en ville. Enfin, en milieux ouverts, une forte diminution des oiseaux est notée aussi bien par le STOC que par notre analyse.
Depuis le début du 20e siècle, la forêt est en essor tant en volume qu’en surface, et fait par ailleurs l’objet d’une activité humaine moins soutenue que les autres milieux, ce qui favorise la bonne démographie des oiseaux forestiers. La création de nombreux plans d’eau artificiels depuis plus de 50 ans ainsi peut-être qu’une amélioration récente de la qualité de certains cours d’eau ont bénéficié progressivement aux oiseaux aquatiques. Les milieux ouverts correspondent en majorité aux espaces agricoles, qui sont soumis à une forte pollution chimique et à une simplification. Les monocultures uniformes avec suppression des haies et des friches appauvrissent considérablement la biodiversité, comme on le constate aussi pour la flore. Un phénomène inverse s’observe en ville, où l’on recrée des effets de lisières à travers parcs et allées d’arbres.
La Pie-grièche grise a été victime de l’effacement des surfaces enherbées et des structures bocagères jusqu’à disparaître de Bourgogne. Le Râle des genêts, quasi éteint, ne trouve plus assez de prairies humides, passées en labour. La Perdrix grise souffre de la mécanisation des cultures et de l’arrosage généralisé qui rend ses couvées difficiles... Tous pâtissent de la raréfaction des insectes. Si le constat n’est pas alarmiste sur tous les plans et que le nombre d’espèces a augmenté localement, à plus vaste échelle, on assiste à une sorte de mondialisation de certaines espèces généralistes et à une chute d’espèces spécialistes. Des suivis de populations sont fondamentaux en complément d’analyses tendancielles globales.
Dans le n° 31 de la revue Bourgogne-Franche-Comté Nature, retrouvez en détail les résultats de l’étude sur les oiseaux nicheurs de Bourgogne sur la période 2006-2018 avec listes d’espèces et analyses. Procurez-vous aussi le n° 8pour comprendre l’évolution de l’avifaune bourguignonne depuis un siècle.
Avifaune : ensemble des oiseaux.
Ubiquiste : pouvant être présent partout, à l’inverse d’une espèce spécialiste.