2000 ans après leur dépôt, les déchets liés à l’activité métallurgique posent question pour la santé des écosystèmes.
La région possède par endroits d’importantes ressources en minerais de fer dans ses sols et sous-sols, qui ont été exploitées très tôt. Le district minier de Puisaye, en Bourgogne, a ainsi abrité dès l’époque romaine des cités dont l’activité était entièrement consacrée à cette exploitation et à l’artisanat associé. Le district de Berthelange, dans le Doubs, est plus tardif, les débuts de l’exploitation datant probablement de l’époque mérovingienne. Notre connaissance de ces activités provient notamment des déchets encore présents aujourd’hui : les résidus issus de la fonte des minerais, nommés scories, forment des tas, les ferriers. Des fours en terre cuite et en argile étaient fabriqués pour faire fondre le minerai de fer avec du charbon de bois à des températures avoisinant les 1 200 °C. On cassait ensuite le four pour laisser s’écouler le liquide en fusion (se solidifiant en scories), pour ne conserver qu’une éponge de fer qui résultait du processus.
À Berthelange, les ferriers font quelques centaines de mètres carrés et quelques dizaines de centimètres d’épaisseur. L’exploitation était artisanale et répondait sans doute à des besoins locaux. Sur le district de Puisaye, en revanche, il s’agissait d’une véritable industrie, avec une exportation à l’échelle européenne. Les ferriers peuvent s’étendre sur plusieurs dizaines d’hectares et une dizaine de mètres d’épaisseur. Ces scories contiennent encore un peu de fer ainsi que d’autres éléments métalliques comme le cuivre, le cobalt, le zinc, le nickel, ou le manganèse. Les scories ont parfois été réutilisées au début du 20e siècle pour récolter le reste de fer, mais la plupart sont restées sur place. Avec le temps, leur altération entraîne un transfert des éléments dans le sol, à la fois par fragmentation mécanique (dispersion de microfragments de scories) et chimique.
L’analyse du sol des sites a révélé des anomalies avec de fortes concentrations en nickel, cobalt, zinc et surtout manganèse. En mettant en corrélation la composition des scories avec celle du sol, les chercheurs ont pu mettre en évidence que ces taux anormalement élevés étaient bien dus aux scories. L’évaluation des risques se base sur l’utilisation d’un bioindicateur de la qualité des sols, l’escargot (Cantareus aspersus). Situé à l’interface sol-plante-atmosphère, il est soumis à une exposition multisource par voies cutanée, digestive, et respiratoire et constitue donc un bioindicateur idéal. Des escargots issus de laboratoire ont été placés dans des cages sur le terrain durant un mois pour étudier si les organismes vivants étaient contaminés par cette pollution. Leurs tissus ont ensuite été analysés.
En Bourgogne-Franche-Comté, les activités métallurgiques ont engendré une contamination des couches superficielles des sols. Même si quelques transferts ont été identifiés, les escargots n’ont révélé qu’un risque environnemental modéré voire absent, à mettre en relation avec le type de substrat, calcaire dans notre région et qui contient peu d’éléments à forte toxicité. Des recherches sont menées de manière transdisciplinaire avec des géologues et des archéologues, notamment à travers les projets Sideros et Alterics. Financés par la Région Bourgogne-Franche-Comté, ils visent à mieux comprendre la contamination des sols et les risques associés via l’étude des processus d’altération des scories.
Visitez le site Internet du laboratoire de recherche Chrono-Environnement de l’Université de Franche-Comté : chrono-environnement.univ-fcomte.fr.