Nombre d'espèces de libellules trouvent leur bonheur sur notre territoire... Que recherchent-elles et comment préserver cette richesse régionale ?
La région compte 76 espèces de libellules. Ce sont des insectes capables de vivre à peu près partout. On en trouve de la zone équatoriale au cercle polaire ! Elles ont globalement pour seule exigence la présence de points d’eau. Si certaines espèces sont ubiquistes, c’est-à-dire adaptées à des conditions très variées, d’autres investissent des niches écologiques spécifiques. La diversité d’espèces sur un territoire est donc déterminée par la variété de facteurs comme l’altitude ou les conditions climatiques. En Bourgogne-Franche-Comté, les influences continentale (au nord-est) et océanique (au sud-ouest) font de la région un carrefour climatique propice à différents cortèges de libellules. Les montagnes et les tourbières du Jura amènent aussi leur lot d’espèces.
La belle diversité d’espèces ne doit pas cacher la régression des populations de libellules en France et en Bourgogne-Franche-Comté. Leurs effectifs baissent depuis plusieurs dizaines d’années sous l’effet des pressions humaines. En cause : la disparition des mares (- 20 % en 20 ans), mais aussi la réduction des débits des cours d’eau liée à nos prélèvements, l’empoissonnement systématique des plans d’eau, ou encore l’utilisation de pesticides.
Le changement climatique représente également une menace pour les libellules. Une partie des espèces méridionales sont assez mobiles et la hausse des températures les amène à monter davantage vers le Nord. En revanche, pour les espèces montagnardes comme pour la Cordulie arctique, en-dehors des îlots qu’elles occupent actuellement, les secteurs qui leur sont favorables sont trop éloignés. On peut donc craindre pour leur avenir.
La signature de conventions « Refuge Mare de Bourgogne », qui permet de participer à la protection des mares au bénéfice des amphibiens et de toute la biodiversité, fait partie des bons moyens pour aider les odonates*.
La grande majorité des espèces demeurent toute leur vie dans un rayon de quelques dizaines de kilomètres. Les larves émergent aux abords du point d’eau où les œufs ont été pondus. En phase aérienne, les adultes peuvent s’éloigner, mais reviennent près de l’eau pour pondre.
Quelques espèces font de bien plus grands voyages, comme l’Anax porte-selle. Originaire d’Afrique, il recherche des sites de reproduction jusque sur le pourtour méditerranéen et peut migrer jusqu’au nord de l’Europe. C’est ainsi qu’on peut le croiser dans notre région !
Odonate : libellule.
Alexandre RUFFONI, Hydrobiologiste et entomologiste à la Société d'histoire naturelle d'Autun
Dans les tourbières, l’espèce typique est sans aucun doute la sombre Cordulie arctique. Auprès des sources au cœur des forêts, on rencontre le Cordulégastre bidenté, noir rayé de jaune, tandis que le fin Agrion de Mercure fréquente les ruisselets prairiaux. Le Gomphe vulgaire, noir et jaune, est une espèce des grands cours d’eau. L'Agrion mignon et l'Aeschne bleue vivent près des mares, quand le Leste des bois, vert métallique, préfère les mares forestières. L’Orthétrum réticulé est un beau représentant des étangs. Quant à l’Aeschne affine, au bleu irisé, elle s’accommode des milieux temporaires.